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Les jeunes sont une cible facile pour les jihadistes, affirme un expert

jeudi 14 novembre 2013


Nouakchott a accueilli, la semaine dernière, une conférence portant sur la sécurité dans le Sahel et dans le Maghreb, rassemblant des experts européens et nord-africains venus débattre des conséquences de la crise de la sécurité.

C’est en marge de cette conférence organisée les 6 et 7 novembre par le Centre Maghrébin d’Études stratégiques de Nouakchott et la fondation allemande Konrad Adenauer que Magharebia s’est entretenu avec Ladji Traoré, analyste mauritanien de renom et grand leader africaniste, pour avoir son avis sur les retombées des évènements survenus au Mali et leurs conséquences sur la Mauritanie.

Magharebia  : Comment jugez-vous la situation sécuritaire au Maghreb et dans le Sahel ?

Ladji Traoré
 : C’est une situation très inquiétante et ce d’autant plus que la Mauritanie constitue historiquement et idéologiquement l’épicentre de cette insécurité.

Cela se manifeste par la diffusion de l’idéologie terroriste jihadiste et le trafic de drogue. Donc, les attentats et autres actes terroristes ont touché très tôt la Mauritanie, en même temps que le Mali.

Et les premiers collaborateurs de Ben Laden étaient des Mauritaniens, notamment son secrétaire particulier et son imam. Et au niveau des Qatibas dans le nord du Mali, la plupart des chefs sont des Mauritaniens. Par ailleurs, les Mauritaniens ont diffusé l’idéologie jihadiste dans les pays d’Afrique noire et même en Europe.

Magharebia  : Mais pourquoi donc les mouvements terroristes ont-ils choisi de s’installer au Mali plutôt qu’en Mauritanie ?

Traoré  : Le pouvoir mauritanien s’est très vite farouchement opposé au terrorisme, ce qui n’est pas le cas du Mali...

En Mauritanie par contre, le pouvoir est allé jusqu’à monter des opérations offensives en territoire malien pour s’attaquer aux terroristes. Cette politique a été très appréciée par l’Occident qui a vu en la Mauritanie un partenaire solide pour la lutte contre le terrorisme dans cette région.

Magharebia  : Et qu’en est-il de la coopération entre les pays de la région dans le domaine de la lutte anti-terroriste ?

Traoré  : Il y a beaucoup d’initiatives et d’institutions, mais qui ne fonctionnent pas. C’est le cas du CEMOC (Comité d’état-major opérationnel conjoint). On fait beaucoup de conférences mais on n’aboutit à rien de concret.

Magharebia  : Pourquoi, selon vous, les jeunes constituent-ils la cible privilégiée des terroristes ?

Traoré  : Vous savez, la jeunesse n’est pas gâtée dans nos différents pays. Elle est livrée au chômage, à la pauvreté, au déficit de formation professionnelle, au manque de perspectives d’avenir. Elle est exposée à la cherté de la vie et aux médias internationaux qui lui font miroiter un monde riche auquel elle aspire.

Pour cette raison, la jeunesse est prête à se vendre à tous les aventuriers. Elle est tentée par l’émigration clandestine et les trafics en tout genre. Donc, pour elle, le jihadisme est un moyen de gagner de l’argent. Cette situation de désespoir fait qu’elle est victime de toutes les tentations.

Magharebia  : Est-ce que vous pensez que l’aide étrangère est nécessaire pour aider nos pays à combattre le terrorisme ?

Traoré  : Nos États et nos armées sont déliquescents. Vous l’avez remarqué avec le problème malien. Il y a eu l’opération Serval car aucune armée africaine n’était capable de relever le défi. Donc, il y a une nécessité objective de faire appel à l’Occident. Ce que nous avons, ce ne sont pas des armées nationales. Ce sont des armées conçues pour défendre des régimes. Et l’Occident connait l’importance économique de cette région d’où la nécessité pour lui d’aider ces pays pour éviter que l’insécurité ne déborde et ne l’atteigne.

Source : Magharebia