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Moustapha Limam Chafi : ’’La Mauritanie est enlisée dans une situation de très lourdes menaces"
samedi 6 mai 2017
Certainement le plus africain des mauritaniens, notre compatriote Moustapha Ould Limam Chafi continue de se déplacer, sans gêne, sur tous les continents où il est plutôt très bien apprécié. Depuis l’avènement de la rectification d’Aziz, cet opposant farouche au régime est interdit du territoire national. Nous l’avons rencontré dans son exil. Il parle sans détour d’Aziz, son régime, l’opposition, les problèmes et l’avenir du pays...
Le Calame : Depuis l’entretien accordé en février 2013 aux journaux Essirage et Biladi, vous ne vous êtes plus exprimé en public, sur la situation du pays. Pourquoi ce long silence et pourquoi avoir accepté maintenant ?
Moustapha Limam Chafi : Il y a des moments où l’on voudrait dire tellement de choses, que la meilleure manière de les dire consiste à garder le silence, le temps d’ajuster le propos. Aussi, me suis-je assigné un tel mutisme et cette réserve provisoire m’a permis la faculté du recul. J’ai pris le temps d’observer, d’écouter, d’évaluer et surtout de juger lucidement la situation du pays.
Il faut admettre que le diagnostic est sans appel. La Mauritanie traverse l’étape la plus périlleuse de son histoire. Elle est prise en otage par un homme qui s’arroge le droit de piller ses ressources et veut soumettre son peuple à la servitude.
Il a érigé la ‘’kleptocratie’’ en mode de gestion de l’Etat. Cet homme, par ses méthodes chaotiques, ses errements aventureux, ses déclarations irresponsables et ségrégationnistes nous mène au désastre. Toutes ses actions consistent à nous diviser, au risque de fragiliser la cohésion nationale et avec elle, l’intégrité physique du pays. Le jugement de l’histoire étant implacable envers ceux qui prétendent méconnaître les évidences, je refuse de cautionner, par mon silence, les dérives de ce pouvoir irascible et pyromane.
Je sors de ma retenue de trois ans pour dénoncer avec force, comme à mon habitude, la conduite charretière du pays et appeler mes concitoyens à se mobiliser pour contrer les actions dangereuses et suicidaires de ce personnage, bref, sauver la nation en danger.
Certains soutiens du régime estiment que vous n’êtes pas mauritanien ?
Je renvoie ceux-ci à consulter l’encyclopédie de l’historien Moktar Ould Hamidoune à propos de mes origines. Il cite les noms de mon père et de mon oncle. D’ailleurs tous mes frères et sœurs sont recensés mauritaniens, comment se peut-il qu’on puisse mettre en doute ce droit pour le moins naturel par rapport à d’autres ?
Ensuite la citoyenneté se mesure par l’amour de la patrie mauritanienne. Bien que je vis depuis un certain temps en exil, je respire la Mauritanie, qui ne quitte jamais mon esprit et suis très préoccupé par son avenir.
Enfin, il faut savoir que la nationalité n’est pas quelque chose qu’on donne à un citoyen dont l’origine ne souffre d’aucun doute.
Il semble que le service de l’état civil au sein de l’ambassade de Mauritanie en Côte d’Ivoire aurait refusé de vous enrôler. Qu’en est-il ?
Je ne suis malheureusement pas le seul mauritanien que ce général putschiste essaie de priver de ce droit élémentaire. Des milliers de frères et sœurs, parce que portant des patronymes non conformes à son idéologie raciste (Diagana, Sarr, Diop…), sont victimes de cette aberration. Le recensement, tel qu’il est conçu et pratiqué aujourd’hui, est un instrument d’exclusion et de division. C’est un moyen de pression contre les adversaires, forts ou faibles. Il est surtout un fonds de commerce.
Comme je l’ai évoqué précédemment, toute ma famille a été enrôlée. Moi-même je suis enrôlé dans le recensement précédent et porteur de tous les documents requis.
Fort de ce droit, j’ai sollicité un rendez-vous au service de l’état civil à l’ambassade afin de m’enrôler. Effectivement en dépit de la régularité de mon dossier, le responsable du recensement à Abidjan, tout en se confondant en excuses et en regrets, a expliqué qu’il aurait reçu des consignes fermes lui interdisant d’enrôler certains mauritaniens dont moi-même. Selon une source proche de l’ambassade, Mohamed Ould Bouamatou figurerait sur cette liste. Il est évident qu’en se comportant de telle manière, Aziz pénalise des milliers d’enfants du pays.
Dans tous les cas, que ça soit moi, Diagana, Mbeyrick ou Wane, dans ce pays nos racines sont fortement ancrées. Une mauvaise herbe peut s’inviter dans la forêt, détruire de fragiles plantes, mais ne pourra jamais détruire le baobab. Lorsque sera désherbée la mauvaise herbe qui a poussé dans ce pays, nous recouvrerons sans doute nos droits.
Que pensez-vous de la situation générale du pays ? La qualifieriez-vous de "stable", "préoccupante", "désespérée" ?
Le pays est enlisé dans une situation de très lourdes menaces. Jamais, depuis l’indépendance, les perspectives n’ont été aussi sombres. Les Mauritaniens sont confrontés à une extension de la misère et l’économie ne crée plus de richesse, d’où la pression accrue sur les biens de l’Etat, seule entité solvable quand tout s’écroule autour. Or, l’Etat, aujourd’hui, se réduit à une niche néo-patrimoniale dont l’actuel Chef de l’Etat fructifie les ressources et privilèges, à son unique profit. Nul n’est désormais à l’abri de la pauvreté, même les nantis d’hier car les voici en concurrence avec le premier entrepreneur de Mauritanie, Mohamed Ould Abdel Aziz, à la fois chef militaire, commerçant, politicien et apprenti-escroc, pas très doué d’ailleurs, comme l’atteste le fameux Ghanagate, sur lequel nous reviendrions, si vous le souhaitez...
Et ceci, malheureusement, dans l’indifférence et l’inertie d’un pouvoir emmuré en sa paranoïa autiste et en totale rupture avec la réalité. Cloîtré dans sa tour, l’étroit sérail vit ses fantasmes et ses illusions, détaché et isolé du peuple et de ses infortunes.
Votre insatisfaction paraît couvrir bien des domaines. Si vous deviez présenter les aspects les plus fondamentaux de la critique, sur quels aspects de la faillite imputée au gouvernement du moment insisteriez-vous ?
Il y a beaucoup à dire et je me suis retenu trop longtemps (rire). Bon, soyons méthodique, tentons le raccourci de la synthèse !
Jetez un coup d’œil furtif aux bureaux de l’administration centrale, dans la capitale, pour vous faire une idée de la régression du niveau de compétence au sein du personnel de l’Etat. Les départements ministériels ne sont plus que des échoppes sans chaland, qui tournent à vide. A l’exception des niveaux supérieurs où se confectionne la signature de telle ou telle dépense, le reste du dispositif vit de petits arrangements, plus ou moins rentables tandis que le mobilier se dégrade et le symbole se dévalue. L’administration mauritanienne, à laquelle Aziz aura ôté toute utilité sociale, fait du surplace et prouve, chaque jour, son inanité. Cet homme l’a vidée de sa substance décisionnelle, en concentrant, entre ses mains, la conception des politiques publiques, l’exécution des directives, leur suivi et, surtout, la comptabilité. Il nomme le personnel subalterne, se mêle des détails d’achats de fournitures, s’emploie à tirer profit de la plus infime occasion de gratter de l’argent sur n’importe quel contrat de fourniture. Il dispose, à cet égard, de prête-noms, de société-écrans et d’une commission nationale des marchés d’une docilité à toute épreuve.
Cet individu, qui ne semble pas familier des rudiments de la science politique, compte sur la seule force prétorienne pour asseoir la paix au service de sa propre continuité. Il ferme les yeux, en conscience pleine, sur les injustices sociales héritées, les discriminations, tolère l’usage de la torture et laisse l’appareil d’Etat se détériorer, encore et encore, sous l’influence quasi-exclusive de la médiocratie.
Le bilan du Président Aziz ne trouve grâce à vos yeux. Un exemple, plus précis, des défauts de gestion publique que vous lui objectez ?
Tenez, revenons un instant sur la ruée vers l’or. Je ne puis évoquer la situation générale du pays sans aborder la folie générale qui a gagné une grande partie de la population. Le pouvoir a créé toutes les conditions pour pousser ses concitoyens à poursuivre des mirages. L’économie immatérielle de la chimère et du fantasme a été mise en branle, entretenue, activée et promue pour dépouiller le peuple de ses dernières ressources. Aux yeux d’Aziz, il n’y a pas de petit profit ; pour ainsi dire - n’y voyez aucune malice, il fait feu de tout bois. Nos compatriotes aveuglés et égarés, par ceux-là même qui se doivent de les protéger et d’améliorer leurs conditions de vie, n’ont hésité, dans l’espoir d’un lendemain miraculeux, à brader les maigres biens encore en leur possession (immobiliers, voitures, bijoux, bétail etc...) pour s’équiper en matériel de détection, véhicules, carburant, vivres, tentes. Des milliers de mauritaniens sont tous revenus contrariés, abusés, ruinés et ce dans l’indifférence de l’autorité qui les aura manipulés, escroqués, avant de les abandonner à leur sort.
L’or a toujours existé, depuis des millénaires dans le monde entier et avec lui l’orpaillage. La civilisation, en sa diversité, se caractérise par la quête artisanale de ce métal précieux, souvent selon des procédés d’une dangerosité et d’un labeur variables. Jamais, à ma connaissance, des précédents du genre, un Etat n’a imposé, à ces concitoyens, de telles taxes.
Ce vol d’envergure inégalée - dans l’histoire pourtant riche du détournement et de la fraude publique en Mauritanie - ne saurait échapper à la vigilance d’un audit sérieux au lendemain du départ de Aziz. Il convient d’envisager, dès maintenant, l’hypothèse d’une réparation, au bénéfice des personnes ainsi rackettées.
Est-ce que ce pouvoir que vous décriez a-t-il tenté de vous approcher ?
Oui. En 2015, un ami et frère m’a dit qu’il a été contacté par des personnes agissant au nom de Ould Abdel Aziz et qui souhaiteraient discuter avec moi. Je lui ai répondu qu’il fallait écouter le message à condition que lui-même soit reçu par le général. C’est ainsi qu’il s’est rendu à Nouakchott et a été reçu effectivement par ce dernier au lendemain de son arrivée à Nouakchott. J’ai quand même insisté avant son départ afin qu’il précise à son interlocuteur que je ne suis point demandeur.
Lors de leur entretien, il a transmis mon message tel quel, ce qui a provoqué une réaction épidermique du militaire qu’il est, et une réponse hâtive : ‘’nous aussi, nous ne sommes pas demandeur’’. En dépit du désintérêt annoncé, ils ont entamé des discussions qui ont abouti à une éventuelle rencontre entre moi et un émissaire mandaté par Aziz.
Quelque temps plus tard, à un moment où je me trouvais dans l’un des pays du Golfe, ledit ami m’a contacté pour m’informer que l’émissaire prévu est prêt à me rencontrer au Maroc. J’ai répondu que mes contraintes ne me permettaient pas d’honorer, en ce moment, cette sollicitation. La rencontre n’a pas eu lieu et aucun autre contact n’a été entrepris. Je souhaite de même ajouter qu’il y a eu précédemment d’autres tentatives non abouties.
Le Président Aziz est déterminé à modifier la Constitution. A votre avis, ne cherche-t-il pas, comme l’accuse l’opposition, un troisième mandat ?
Oui, bien entendu et vous seriez fort ingénieux de supposer la menace écartée. Aziz a essayé d’habituer les mauritaniens à l’idée de sa perpétuité au pouvoir, notamment par les déclarations de ses ministres. Ils s’y sont essayés, un à un, comme s’ils se passaient le témoin. A nul moment, il ne les a désavoués et certains purent récidiver. C’est dans cette projection que le fameux dialogue fut convoqué. Il fallait obtenir l’aval des délégués, préalablement conditionnés, pour l’adoption d’un projet de passage à une nouvelle république, une ruse qui annulerait, de facto, les effets des articles de la Constitution précédente, sur le serment de ne jamais modifier la limitation des mandats. Les changements de drapeau, d’hymne et la haute cour de Justice s’inscrivaient dans le processus oblique de la diversion. Ils devaient distraire l’opinion d’une tentative grossière et trop directe de tripatouiller les dispositions visées.
La suite, vous la connaissez : de grands partis d’opposition et les principales associations de la société civile ont boycotté la mascarade. Ceux qui s’y rendaient de bonne foi durent réagir, avec fermeté et patriotisme, après avoir découvert le projet, sur le tard, aux heures tardives de la discussion sur les réformes institutionnelles. La fronde gagna les rangs mêmes des partisans de la majorité autoproclamée et jusqu’aux élus de l’UPR, le parti-Etat. Jamais, gouvernement disposant d’autant de leviers n’aura été à ce point désavoué. La Mauritanie ne veut plus d’Aziz et c’est à peine si elle le supporterait encore d’ici-2019, voici, en substance, le message final du dialogue.
Vos craintes se sont-elles dissipées après les déclarations publiques d’Aziz de ne pas chercher un troisième mandat ? Pour la première fois dans l’histoire du pays, un Président céderait le pouvoir, par la voie pacifique...
Non, hélas, le danger n’est écarté pour autant. Autour du Chef de l’Etat, une équipe restreinte travaille à forger une nouvelle formule, juridique ou factuelle, qui permette à Aziz le contrôle perpétuel de la décision politique en Mauritanie. Parmi les options envisagées figurent des scénarii de provocation et de conspiration visant à créer les conditions objectives d’un désordre qui appellerait l’intervention gaullienne du sauveur, en bref, de l’homme fort, l’unique recours devant le délitement social. En complément de l’hypothèse martiale, le comité travaille, également, au plan alternatif, sur une succession verrouillée, soit par le choix d’un dauphin obéissant (très risqué, quand même, rires) soit avec le retour d’une formule de révision simplifiée de la Constitution qui consacrerait le rôle d’une personnalité non-élue au suffrage universel. Pour l’instant, la confusion et le tâtonnement dominent les travaux de cette cellule vouée à imaginer et activer le mécanisme de l’effraction juridique ou, à défaut, du braquage armé. Croyez-moi, en dépit de notre éloignement du pays, nous suivons de prés tout ce qui s’y trame et sommes informés des détails y compris dans son cercle le plus intime. Ce monsieur n’écarte aucun des deux ordres de perspective, malgré ses propos rassurants, lors de la clôture de son dialogue avorté. D’ailleurs lors de sa dernière conférence de presse n’a-t-il pas avoué qu’il resterait sur scène et qu’il œuvrera même à imposer une nouvelle constitution.
Avant de finir ma réponse sur cette question, permettez-moi de saluer les 33 sénateurs qui ont rejeté les amendements constitutionnels soumis à leur approbation. Ils ont fait honneur au pays et ont préservé des intérêts vitaux de la Nation. J’attire l’attention du général qu’il fait un mauvais calcul quand il dit que 33 personnes ne peuvent faire pencher sa République. Il ne s’agit pas de 33 personnes seulement mais plutôt de trente-trois départements, des centaines d’ensembles traditionnels, des centaines de milliers de personnes prêts à les porter sur leurs têtes.
Sur quoi vous fondez-vous pour mettre en cause la crédibilité du Président quand il s’est engagé publiquement à respecter les règles de dévolution naturelle du pouvoir ?
Un ami libyen, très proche collaborateur de Kadhafi, me confiait que lorsque le général, après son coup d’état, avait démissionné pour se présenter aux élections, le numéro un libyen s’était inquiété de l’éventualité qu’il ne puisse gagner, surtout face à une coalition objective de la classe politique. Et donc Kadhafi avait mandaté cette personne pour apporter au général d’abord un important soutien financier, ensuite s’enquérir de la situation qui lui semblait inquiétante pour son poulain. Lorsqu’il a transmis au protégé du guide les inquiétudes de son parrain, il lui a donné la réponse suivante :
« Rassure le guide, que je n’ai pas pris le pouvoir par la force pour le céder à qui que ce soit, même par les urnes. Ma démission n’est qu’une astuce pour contourner les pressions de la communauté internationale qui exige de nous des élections. Je contrôle parfaitement la situation et suis le seul maitre à bord. Tu peux le rassurer que toutes les dispositions ont été prises, pour garantir ma victoire au premier tour ».
Je me pose la question de savoir quelle est sa nouvelle manœuvre, que tente-t-il de nous servir à nouveau ? C’est un affabulateur, il ne croit pas en la démocratie et depuis qu’il est arrivé, il n’a jamais respecté une parole ou un engagement. Il nous a habitués aux déclarations contradictoires. Il affirme toujours une chose et confesse le contraire.
Dans sa conférence de presse, il déclare n’avoir jamais voulu modifier la constitution et dit en même temps vouloir organiser un référendum pour supprimer le sénat et créer des conseils régionaux. Mais une fois le Sénat supprimé, on s’achemine forcément vers l’adoption, sans gêne, d’une nouvelle constitution.
Sur la question de son maintien après son mandat, c’est lui-même qui a volontairement entretenu le doute, par son discours et son comportement. Il ne s’est jamais démarqué de ceux, membres du gouvernement ou laudateurs, qui suggèrent de le maintenir contre vents et marées, aussi se garda-t-il de les rappeler à l’ordre. Il les utilisait en guise d’éclaireurs.
A plusieurs reprises, vous déclariez que le putsch est à présent démodé. Maintenez- vous cette opinion et ses incidences pratiques, même dans la perspective que vous venez de décrire ?
Un putsch c’est un saut dans l’inconnu aux conséquences incalculables. Une nation ne peut se permettre ce risque d’aventure. En Afrique, le sous-développement et la précarité, dans lesquelles ont sombré beaucoup de pays sont la conséquence des coups d’état répétés. Ils imposent à la tête de nos pays des hommes incompétents et inaptes à diriger. Mon opinion sur les putschs est inchangée, il faut aspirer au changement par des voies plus démocratiques.
Je dois malheureusement admettre que certaines situations de pouvoirs dirigistes, autoritaires et népotistes avec leurs corollaires d’injustices, de corruptions, de démagogie, de blocage de la vie politique peuvent ouvrir les voies à tous les risques y compris le coup d’état. Et même l’implosion. Notre résistance au coup d’état militaire doit être la même qu’au coup d’état constitutionnel.
Vos amis de l’opposition ne sont-ils pas responsables de l’impasse actuelle, car divisés, faibles et dans l’incapacité d’incarner l’esprit de la résistance ?
Le pouvoir mauritanien s’est assigné, comme mission essentielle, la destruction totale de l’opposition, au point de se détourner de toutes ses tâches et obligations. Il y a consacré tous les moyens de l’Etat afin de l’affaiblir et la précariser.
Ses services de sécurité ont mené des actions de sape permanentes et soutenues dans le but de la miner, afin de la diviser et de la déstabiliser. Ils ont usé sans état d’âme des méthodes les plus déloyales et illégales (écoutes téléphoniques, achats de consciences, intimidations, brimades, chantages et plus récemment, tortures...)
L’administration a été purgée de tous ceux qui sont suspectés de la moindre sympathie à l’opposition, au point de la vider de toutes ses compétences et expériences. Aujourd’hui, de nombreux cadres Mauritaniens sont à la recherche d’emplois sur tous les continents.
Les opérateurs économiques ne sont pas épargnés. Ils sont sous surveillance et n’ont jamais subi autant de pressions et de menaces afin de les dissuader d’une éventuelle relation avec quiconque serait suspecté d’être opposant au pouvoir du dictateur. Qu’ils soient amis ou frères, on exige leur bannissement.
On tente aussi très maladroitement d’utiliser le facteur tribal pour désocialiser ceux qui osent toujours tenir tête.
Et malgré tous ces moyens mis en œuvre par lui, il n’a pu venir à bout de ses adversaires et, ne pouvant admettre son échec, l’homme perd son contrôle, s’emporte et choisit de s’engager dans la délation, le dénigrement et la médisance. Un discours pour le moins inhabituel pour ce niveau de responsabilité et qui dénote de son aveu d’échec et de faiblesse évidents.
Je ne souhaite pas revenir sur son réquisitoire public et ses propos, injurieux, haineux et orduriers à l’encontre de l’opposition et d’une importante composante nationale, mais je souhaite juste souligner qu’ils sont indignes d’un homme ayant la charge de conduire le destin d’une nation et dénotent d’un manque de respect et de savoir-faire.
Et pour revenir à mes amis de l’opposition comme vous dites, il faut reconnaître que, malgré toutes les épreuves et obstacles auxquels ils ont été confrontés, ils existent toujours et sont incontournables. Ils n’ont jamais renoncé à leur combat et ne se sont pas compromis. Ils ont été constants et déterminés dans leurs engagements et à aucun moment leurs convictions n’ont été ébranlées. Rien au monde ne peut venir à bout de la force de conviction, c’est elle qui a permis à Ghandi, Mandela et autres figures de la résistance de triompher de leurs bourreaux.
En effet certains s’offusquent de la faiblesse de l’opposition, parce qu’aujourd’hui face au drame que vit le pays, ils attendent davantage de ses dirigeants. Ils souhaitent des actions fortes qui permettront d’inverser le rapport de force et surtout empêcheront Aziz de vouloir s’éterniser au pouvoir, ou nous imposer quelqu’un qu’il continuera à manipuler.
Le président Aziz ne cesse pourtant d’appeler au dialogue. Qu’en pensez-vous ?
Le dialogue est le meilleur outil pour garantir les intérêts de tous les protagonistes d’une belligérance et est, aussi, le mode le plus approprié de règlements de conflits. Même les guerres aboutissent au dialogue. Moi, je crois à son intérêt et lorsque la perspective a été pour la première fois évoquée, j’ai eu des entretiens sur le sujet avec d’importants responsables de l’opposition. Nous en avons sérieusement discuté et j’ai honnêtement encouragé mes interlocuteurs à la pertinence d’un dialogue. Et pour justifier la justesse de ce choix, j’ai évoqué des exemples de négociations entamées en Afrique et que j’ai eu le privilège de suivre.
Elles avaient abouti à la mise en place dans ces pays d’institutions consensuelles dont la crédibilité et la fiabilité ne souffrent d’aucun doute. Ces organismes souverains et impartiaux ont permis l’organisation d’élections justes et transparentes, qui ont consolidé la paix et la stabilité et ont renforcé la démocratie. Fort de ces expériences, j’ai exhorté mes amis à s’y engager.
Cependant le dialogue exige des comportements et des contraintes et toutes les parties doivent y souscrire.
Un vrai dialogue implique le dépassement de ses intérêts particuliers et exige la bonne foi, la sincérité, l’honnêteté et surtout le respect de l’autre. On doit y exclure le rapport de force, la surenchère, la ruse et les faux-semblants.
Quand on appelle au dialogue, on doit apprendre à écouter, à comprendre ce que l’autre veut dire.
On ne doit pas chercher à négocier avec soi-même.
Vous constaterez avec moi que Ould Abdel Aziz, qui a pris l’initiative d’appeler au dialogue, ne se donne aucun moyen pour se plier à ses exigences, qui sont la preuve de la volonté des parties d’établir et de conserver une relation permettant de jeter les bases de discussions confiantes et sereines.
Il semble que chez lui, le dialogue sert de stratégie pour gagner du temps et empêcher l’opposition de faire valoir ses droits. Sinon, comment expliquer son appel ardent au dialogue alors qu’il s’est engagé dans un comportement provocateur, intimidant et trompeur. Il entreprend lui-même les actions de sabotage et de dégradation afin de faire échec à des discussions sincères. Son invitation au dialogue n’est qu’un leurre pour imposer un agenda, qu’il est lui-même, à ce jour, incapable de définir. En réalité, il est à la recherche d’une ultime ruse lui permettant de trouver le stratagème qui lui légitimerait, soit son maintien au pouvoir, soit perpétuerait sa mainmise sur le pays.
Dans votre entretien de 2013, vous appeliez à « dégager Aziz ». Non seulement il se serait consolidé (Président de l’UA, président de la ligue arabe, médiateur de la crise gambienne…) mais chercherait même à se perpétuer.
Lorsque vous ne bénéficiez ni de la confiance du peuple, ni de son soutien, vous êtes forcément condamnés à ‘’dégager’’, le plus souvent, dans des conditions indignes et humiliantes.
Les mauritaniens, dans leur ensemble, n’ont pour cet individu que déconsidération, mépris et dégoût y compris ses plus proches collaborateurs.
Le fossé est désormais infranchissable entre le peuple qui a faim et ce chef multimilliardaire et mégalomane, la réplique améliorée de Bébé Doc de Haïti.
Entre le peuple et lui, la rupture est consommée. Quoiqu’il advienne, son sort est scellé. Je crains malheureusement, qu’il ne soit de la trempe de ces dictateurs et despotes qui ont été pour leurs pays un véritable cancer. Plus leur pouvoir se prolonge, plus le pays se métastase et
se déstructure. Dans la durée, ils accumulent les mauvaises gestions, ils s’accaparent de la moindre parcelle de pouvoir, amoncellent la fortune pendant que le pays croule et se décompose. Après leurs chutes, ils lèguent des pays meurtris, non solvables, en ruine, totalement faillis et parfois en proie à la division ou aux conflits. Les guerres en Somalie et au Liberia sont les conséquences des passages de Siad Bare et Samuel Doe. Les crises centrafricaines et haïtiennes d’aujourd’hui sont aussi les conséquences des passages de Bokassa et Duvalier. Les exemples de ces autocrates qui ont conduit leurs pays au fiasco foisonnent, je me suis amusé à les répertorier et à comparer leur parcours, leurs comportements et leurs gestions des hommes et des pays avec le pouvoir actuel mauritanien, ils sont à tout point de vue semblables.
Plus longtemps Aziz restera, plus lourd sera le passif.
Pour revenir au partenariat stratégique avec les occidentaux, nombreux s’en sont prévalus et ont été renversés dans des conditions avilissantes et humiliantes et ce, sans que les occidentaux censés les prémunir et les protéger, ne leur viennent en aide.
Souvenez-vous du gendarme du Moyen-Orient, fidèle et loyal serviteur de l’Occident, garant de ses intérêts dans la région, le tout puissant Chah d’Iran que ni le soutien des Etats-Unis, ni la répression impitoyable n’ont pu sauver.
Il est mort en exil rongé par la maladie et l’amertume, abandonné, en errance et indésirable.
Hussein Habré, aujourd’hui jugé pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité a été en son temps un important allié et un rempart contre la Libye révolutionnaire du bouillant colonel Kadhafi et ses légions islamiques.
Mobutu a été en première ligne pendant la guerre froide, au point où la légion a sauté sur Kolwezi pour sauver son pouvoir en péril. Comment est-il parti ?
Pour revenir aux événements les plus récents, j’évoquerai deux illustres personnages arabes et aussi africains, Hosni Mubarak et Zeine El Abidine ben Ali. A tout point de vue, ils furent des alliés et des partenaires plus crédibles et fiables que Aziz, aussi bien des occidentaux, des africains que du monde arabe. Pourtant aucune force sur terre n’a pu empêcher leurs effondrements. Je peux continuer à citer les exemples, mais je préfère m’arrêter à ceux-là et préciser que l’unique et véritable allié stratégique c’est le peuple.
Quant aux présidences de l’Union africaine et de La Ligue Arabe, elles ne prémunissent pas d’une chute éventuelle et ne constituent en aucun cas facteur de légitimation. D’abord Aziz a accédé à la présidence de l’UA par défaut et je ne reviendrai pas sur les circonstances. Ensuite présider l’U.A n’est pas en soi un exploit. Malheureusement des hommes d’Etat controversés et déniés de compétences comme lui ont eux aussi présidé cette institution : Mobutu Sese Seko du Zaïre de 1967 à 1968, Mohamed Siad Bare de Somalie de 1974 à 1975, ldi Amin Dadda de l’Ouganda de 1975 à 1976, Gaafar Numeiri du Soudan de 1978 à 1979, Mengistu Hailé Mariam d’Éthiopie de 1984 à 1985.
De 2009 à 2010, Mouammar Kadhafi a présidé l’Union africaine et ce perchoir ne lui a donné aucune légitimation qui puisse empêcher en 2011 sa chute dans les conditions horribles que le monde entier a suivi en direct et depuis son pays vit le drame et la douleur.
Dans quelles conditions tous ces hommes sont-ils partis ? Et dans quelles conditions ont-ils laissé leurs pays ?
Prions nuits et jours pour la Mauritanie ! La légitimité et la légitimation aussi n’émanent que du peuple et de lui seul.
Qu’est ce qui, à votre avis, provoque l’échec du pouvoir de Aziz ?
La première cause principale de l’échec du pouvoir actuel est incontestablement l’incompétence avérée de l’homme qui le préside. Comment voulez-vous amener un bateau à bon port, alors que son commandant n’est doté d’aucune qualification de pilotage et profane, à différencier bâbord de tribord ?
Ce fameux général s’est accaparé du pouvoir et au fil des années est apparu sans vision, d’une moralité douteuse, incapable de comportements exemplaires et confondant l’Etat à sa propre personne et le pays à sa chose. Aussi, il a montré ses limites à convaincre la population, car ne parvenant jamais à s’appuyer sur un constat lucide de la situation du pays. Les mauritaniens sont aujourd’hui unanimes qu’il est dénué de la capacité d’écoute et de dialogue encore moins de persuasion ou de rassemblement. Et surtout il s’est révélé suffisant, arrogant et menteur au point de se mentir à lui-même.
Selon Jacques Attali, "un président doit avoir une capacité à ne pas mentir à lui-même, et à décider, sans le faire en fonction de ses intérêts personnels "
Aucun doute que toutes les décisions prises dans ce pays, depuis son putsch, le sont exclusivement dans son intérêt et de celui de son clan.
C’est cet homme incapable de discernement et dénué des qualités minimales à diriger qui a concentré entre ses mains et sans partage tous les pouvoirs dans ce pays. Il est à la fois roi et planton.
Il y a quand même quelque une chose que vous ne pouvez pas nier : la réussite de Aziz sur le plan sécuritaire et la guerre contre les Salafistes, même si on parle d’un document américain accusant la Mauritanie d’avoir signé un pacte avec Al Qaida ?
Aujourd’hui où aucun appareil sécuritaire au monde ne peut s’opposer à une menace terroriste, il est très prétentieux de la part du gouvernement mauritanien, de prétendre sans aucune modestie au succès qu’il revendique.
Tous les projets d’attentats déjoués en Mauritanie l’ont été grâce à l’assistance et au soutien de services étrangers, qui, eux-mêmes, ont été victimes sur leurs territoires d’actions terroristes.
Des actions qui sont la conséquence de la radicalisation de jeunes ressortissants de ces pays et leur présence dans des sanctuaires djihadistes. Lorsque vos concitoyens épousent cette idéologie et fréquentent les zones de combats, vous êtes forcément sous la menace de leurs activités terroristes.
Et nul ne peut nier l’adhésion massive de nos jeunes compatriotes à tous ces groupes djihadistes et leur présence effective dans de multiples foyers terroristes à travers la planète, avec parfois des rôles de premier plan.
Comment peut-on revendiquer une telle victoire, alors que de nombreux responsables terroristes et auteurs d’attentats au Mali voisin, en Libye et en Tunisie sont des ressortissants Mauritaniens.
Nous avons un président qui utilise la lutte contre le terrorisme comme fonds de commerce, afin de manipuler tous les partenaires sensibles à cette menace et s’en faire des alliés pour renforcer son pouvoir en mal de légitimité. Le 28 novembre 2015 dans une conférence de presse, il a osé prétendre que la Mauritanie est le seul pays arabe qui n’a aucun ressortissant membre de l’E.I. (Les maures disent que, si celui qui parle est idiot, ceux qui l’écoutent ne le sont pas)
Après l’attaque par les forces libyennes de Sabrata, fief de l’Etat islamique, trois jeunes mauritaniens membres du groupe ont été appréhendés. Ligotés, leurs images ont circulé sur les réseaux sociaux. On signale, à Syrte et Jdabia, la présence de nombreux mauritaniens. D’ailleurs notre compatriote, Hamada Ould Ahmed Khairou, fondateur du Mujao, est le mufti de Daech dans cette localité. En Irak et en Syrie, aussi, on signale la présence de nos compatriotes.
Aux premières heures de la création d’Al Qaida, il y avait des Mauritaniens autour de Ben Laden et aujourd’hui nous en avons dans l’E.I.
Quant aux documents américains qui laisseraient entendre que le pouvoir mauritanien aurait acheté la paix, je ne suis pas en mesure ni de les confirmer, ni de les infirmer.
En revanche, je sais ceci, de source très sûre : lorsque Aqmi avait enlevé un gendarme mauritanien à Adel Bagrou, c’est un membre de ce groupe détenu à Nouakchott qui a servi d’intermédiaire, à la demande des autorités mauritaniennes, pour obtenir sa libération. Après le dénouement de la prise d’otage le même personnage qui a géré les négociations à contacté Aqmi au Mali pour leur transmettre un message de Mohamed Ould Abdel Aziz en personne qui était une proposition d’offre de paix. Je jure par Allah que je tiens cette information d’une source très fiable et informée au premier plan, mais je n’ai jamais connu son contenu, ni autre détail.
L’offre avait été faite au responsable du groupe, Yahya Abu Hamam, mais je n’ai aucun élément me permettant de confirmer l’aboutissement de la démarche.
Mais, je constate que le groupe s’est depuis installé à la frontière de la Mauritanie, d’où il développe ses activités et circule librement sans être inquiété. Il mène ses actions dans toute la région de Tombouctou et se replie en toute sécurité dans ses sanctuaires frontaliers de la Mauritanie. De sources concordantes au nord du Mali, il se ravitaillerait en vivres et carburant dans notre pays.
Ici, je dis évoquer trois incertitudes qui me taraudent.
Premièrement : Pourquoi la Mauritanie guerrière qui avait envoyé ses troupes hier combattre Aqmi à Hassi Sidi en profondeur du territoire malien, dans la forêt de Ouagadou, tolère aujourd’hui, où il y a une coalition internationale, la présence de ce groupe à sa frontière ?
Deuxièmement : A moins d’avoir un deal, sinon pourquoi ces groupes qui ont une capacité de nuisance avérée et qui parviennent à frapper dans le monde entier épargnent-ils la fragile Mauritanie à leur frontière ? La preuve : dans sa dernière sortie médiatique, Iyad Ag Ghali, président de la nouvelle alliance jihadiste Ansar Al Islam Wal muslimin, a dressé la liste de neuf pays ennemis. La Mauritanie, comme par hasard, n’y figure pas….
Les États-Unis, la France, la Belgique, la Turquie, l’Arabie Saoudite, l’Indonésie, etc.... n’ont pas été épargnés. Malgré des moyens humains d’une expérience et d’une compétence irréprochables et des moyens technologiques de pointe, ces pays n’ont pu s’opposer à des actions.
Cette trêve, si on ose l’appeler ainsi, observée par les deux parties, dans le contexte de menaces qui pèsent sur le monde, laisse forcément supposer un accord...
Troisièmement : La Mauritanie a intercepté un homme qui pendant l’occupation du nord du Mali a été porte-parole d’Aqmi et d’Ansardine. Cet homme fut sécurisé par les autorités dans une villa du quartier chic de Tevragh Zeina, avant d’être libéré en catimini sans avoir jamais rencontré un juge. Le traitement de faveur dont il a bénéficié n’est- il pas une contrepartie offerte à Aqmi ?
Aussi permettez-moi d’évoquer un sujet, même s’il ne relève de votre question, celui de la drogue. Savez-vous que le Mali n’est qu’un pays de transit vers d’autres destinations… Toute cette drogue arrive chez lui via la Mauritanie ?
On sait que vous êtes ami de Birame Dah Abeid, quelle est votre évaluation du problème de l’esclavage, des castes et du racisme ?
J’estime être un démocrate. A ce titre, je rejette les discriminations et injustices dont étaient victimes certaines franges de notre société. Je continue d’appeler à une réconciliation nationale opérée sur la base du rétablissement de la vérité, l’indemnisation et le pardon.
Par rapport à l’esclavage, il est évident que le phénomène persiste dans la mesure où l’on continue à prendre des lois pour le combattre. Aux Etats Unis où ce fléau a été aboli depuis des siècles, on émet encore des mesures de discrimination positives pour réparer ses séquelles. Que dire de la Mauritanie où il n’a été aboli qu’en 1981 ?
Quant à Birame, j’apprécie la lutte que ses amis et lui mènent pour libérer les leurs. Et je ne suis pas le seul à le faire dans le monde où il est primé presque tous les jours pour son combat. Je rappelle enfin que j’entretiens de bons rapports avec tous les militants anti-esclavagistes et je soutiens effectivement leur combat juste. J’estime que tous les patriotes mauritaniens demeurent sensibles, comme moi, à cette question.
Je ne peux pas finir ma réponse à cette question sans rappeler le vil comportement d’Aziz qui ne perd pas d’occasion à manipuler les différentes communautés en montant les unes contre les autres. C’est ainsi qu’il a dit à Birame que les chefs religieux maures et les responsables des partis n’ont épargné aucun effort pour le convaincre de l’exécuter… Selon un ami politique négro-mauritanien à qui Aziz avait fait des confidences, ce dernier lui a expliqué que le problème du pays ce sont les maures qui refusent de lui permettre d’engager les réformes susceptibles de réparer les injustices à leur égard. La même propagande est servie à la communauté maure en se positionnant comme l’unique rempart contre le péril noir.
Quelle est votre relation avec l’homme d’affaires Mohamed Ould Bouamatou ? Est-ce qu’il y a une coordination politique entre vous ?
J’ai eu le plaisir de rencontrer pour la première fois Mohamed Ould Bouamatou à Marrakech pendant un séjour que j’ai effectué dans cette ville en octobre 2014. Il m’avait convié à un déjeuner, chez lui, avec des amis communs.
Lors des événements du Burkina Faso, j’ai été très touché par l’attention qu’il nous a portée, ma famille et moi. Il n’a pas cessé de s’enquérir de nos nouvelles et de se préoccuper pour notre sécurité. J’ai ressenti à travers ses appels réguliers et fraternels un réel sentiment d’affection fraternelle et une manifestation de solidarité sincère. J’avoue ne connaissant pas auparavant l’homme avoir été surpris par sa promptitude à m’apporter sa solidarité. Sa solidarité n’a pas failli et j’en suis profondément touché.
Nous avons gardé, lui et moi, des contacts affectifs et respectueux. C’est notre droit.
Après le décès du fils du président, vous avez été l’une des premières personnalités à lui présenter les condoléances. Certains considèrent cela comme une façon de se rapprocher de lui.
Je suis profondément croyant et ma foi en Dieu ne me permet pas de me réjouir du malheur d’un frère en islam.
Je ne souhaite à aucun adversaire une situation de malheur ou d’humiliation. Pour l’homme, Mohamed Ould Abdel Aziz, je ne ressens aucune haine, ni animosité et aussi pas de rancune. C’est pourquoi dans ces circonstances d’affliction et de deuil, ce moment de profondes douleurs pour le père qu’il est, qui vient de perdre son fils dans la fleur de l’âge, j’ai voulu apporter ma compassion et ma solidarité en cet instant de fragilité. Mes condoléances à lui et à toute sa famille viennent du fond du cœur et sont sincères.
A ceux qui pensent que je voulais me rapprocher de lui, je dirais que c’est une indécence que mon éducation et ma culture ne me permettent pas.
Un dernier mot ?
Oui, j’ai un dernier mot pour tous mes compatriotes. Pour tous ceux qui, dans ce pays, ont décidé de braver cette dictature et défendre l’honneur et la dignité des femmes et hommes de notre patrie. Tous ceux qui ont consenti de défendre par le sacrifice l’intérêt suprême de cette chère Nation. Aussi voudrais-je dire Merci au nom du peuple mauritanien à tous ces jeunes artistes qui, courageusement par l’excellence de leur art, écrivent une page nouvelle de la résistance.
Je souhaite conclure par cette citation d’un grand homme, Nelson Mandela : ‘’l’honneur appartient à ceux qui ne pas de la vérité, même dans l’obscurité et la difficulté, ceux qui essaient toujours et qui ne se laissent pas décourager par les insultes, l’humiliation ou même la défaite. ‘’
Propos recueillis par Ahmed Ould Cheikh et Moussa Ould Hamed
Source : LeCalame.info