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Rapport sur la situation économique en Mauritanie : pourquoi est-il essentiel de permettre aux femmes de participer pleinement à l’activité économique

vendredi 17 septembre 2021


Comme dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest et centrale, la crise de la COVID-19 a perturbé l’activité économique en Mauritanie et fait chuter la croissance de 5,9 % en 2019 à -1,5 % en 2020. Cette contraction tient essentiellement à la mauvaise performance des secteurs de la pêche et des services, fortement affectés par les mesures de confinement. La COVID-19 a particulièrement affecté le bien être des ménages, les trois quarts d’entre eux ayant déclaré avoir subi une diminution de leurs revenus professionnels. Cette tendance est plus marquée dans les villes de Nouakchott et Nouadhibou, où se concentre la majorité des employés du secteur des services.

Le rapport, Un meilleur avenir : accélérer la relance économique en misant sur le potentiel des femmes, note que si l’activité économique s’est ralentie en raison de la pandémie, le soutien des bailleurs de fonds et l’amélioration des termes de l’échange ont permis d’alléger les pressions sur le compte courant et le budget. Ainsi, le ratio de la dette au PIB est resté stable, bien que le risque de surendettement demeure élevé. À moyen terme, la croissance devrait rebondir grâce à la reprise du secteur non extractif, à l’augmentation de la production minière et au début de la production de gaz en 2023. « Les perspectives macroéconomiques restent cependant sujettes à quatre risques principaux : l’impact prolongé de la pandémie, les aléas climatiques, des retards éventuels dans les réformes structurelles et l’insécurité régionale », souligne Samer Matta, principal auteur du rapport et économiste à la Banque mondiale.

Partant du constat que le renforcement du potentiel et des opportunités des femmes et des filles est une condition essentielle au développement de l’économie, le second chapitre du rapport porte son attention sur les femmes et analyse les principaux obstacles à leur épanouissement économique. Selon le rapport, les inégalités hommes-femmes en matière de capital humain coûtent à la Mauritanie 19 % de sa richesse nationale.

Présentent dès l’enfance, ces disparités se produisent dans de nombreuses sphères de la vie, et empêchent les femmes de participer pleinement à l’activité économique.

La loi protège moins les femmes que les hommes

Malgré les progrès réalisés au cours de la dernière décennie, l’environnement juridique en Mauritanie reste discriminatoire à l’égard des femmes. En 2020, le pays se classait au 177e rang mondial dans l’Indice sur les femmes, l’entreprise et le droit. Cette discrimination juridique se retrouve dans des domaines aussi divers que l’inaccessibilité à certains emplois, l’incapacité juridique à être chef de famille, le manque de protection contre l’inégalité d’accès à un prêt bancaire ou à un emploi, sans compter les inégalités de salaires et de droits de propriété.

La pratique du mariage précoce a de nombreuses conséquences négatives

Un tiers des filles mauritaniennes sont mariées avant d’avoir 18 ans et un quart d’entre elles ont un enfant avant leur majorité. Le mariage des enfants, les grossesses précoces et leurs conséquences sur l’éducation des filles demeurent les causes principales des inégalités hommes-femmes en Mauritanie. Alors que d’autres pays du Sahel commencent à prendre des mesures juridiques pour mettre un terme à cette pratique, la Mauritanie n’a pas progressé dans la réduction des mariages d’enfants. Au contraire. Le rapport constate une augmentation du nombre de filles mariées trop jeunes, par rapport à la génération précédente.

La Mauritanie est un des pays d’Afrique de l’Ouest qui a le moins de femmes présentent dans la vie publique

Même si les femmes mauritaniennes ont des droits électoraux équivalent à ceux des hommes, et ont vu leur représentation au parlement augmenter de 3 % à 20 % entre 2000 et 2018, leur voix et leur représentation restent limitées en raison de pratiques discriminatoires. Les normes sociales sont souvent à l’origine des désavantages auxquels les filles et les femmes sont confrontées et tendent à les cantonner dans leur rôle d’épouse, de mère et de femme au foyer.

Le rapport propose une série de réformes pour réduire les inégalités entre les hommes et les femmes. Il recommande avant tout de supprimer les obstacles juridiques pour améliorer les opportunités socioéconomiques des femmes. Notamment par l’introduction dans la loi du principe de « à travail égal, salaire égal ». Mais aussi en garantissant aux femmes les mêmes des droits au divorce que les hommes et en les protégeant financièrement en cas de divorce, en reconnaissant la valeur de leurs contributions non monétaires ou de leur travail non rémunéré.

Le rapport suggère ensuite de lutter contre le mariage des enfants et les grossesses précoces, en mettant en place des mesures pour que les filles poursuivent leur scolarité jusqu’à la fin de l’enseignement secondaire. Il note d’ailleurs que cet investissement dans l’éducation des filles sera le plus efficace à moyen et long terme pour réduire le coût économique des inégalités de genre.

Enfin, le rapport encourage la Mauritanie à renforcer son cadre institutionnel et les initiatives en faveur de l’autonomisation et la représentation des femmes.

« En prenant les mesures nécessaires pour donner aux femmes les moyens de développer leurs compétences professionnelles et de travailler, le gouvernement réussira à accroître la productivité de tous les citoyens et à stimuler le développement économique à long terme », explique Paula Tavares, spécialiste principal des questions de genre à la Banque mondiale et co-auteur du rapport.

Source : Banque Mondiale